Art scriptural Atelier d'écriture Bachelard Deux Mil Dix Neuf

A ce moment là j’ai su que je n’aurais pas dû…

J’avais rendez-vous à neuf heures pour l’entretien d’embauche à l’agence d’intérim Addeco à Valmy. J’avais calculé l’itinéraire avec Divia City, il me fallait partir à 8h10. Il était 8h05 et je n’étais pas chaussé, je n’avais pas mis ma veste, je n’avais pas préparé le nécessaire tabac-feuilles-filtres, je n’avais pas imprimé mon CV, je n’avais pas rassemblé mes affaires… A ce moment là j’ai su que je n’aurais pas dû trainer pour boire mon café. Je cherchais parmi mes documents mon CV, l’ouvrais et lançais l’impression. Je jetais un dernier coup d’œil et à ce moment là j’ai su que je n’aurais pas dû mettre une photographie : j’avais le regard bien trop fatigué. J’ouvrais un dossier contenant des papiers de la CAF, y glissais le CV, prit le dossier sous le bras, et à ce moment là j’ai su que je n’aurais pas dû le mettre sous le bras : j’avais besoin de mes mains pour me chausser. Je me précipitais pour faire les lacets et, décidément, y arrivais très mal. A ce moment là j’ai su que je n’aurais pas dû acheter des chaussures à lacets : les scratch vont bien plus vite pour mettre ses chaussures. J’y arrivais enfin, prit ma veste et entreprit de trouver mes clés. Elles n’étaient pas sur la table, elles n’étaient pas sur le bureau, elles n’étaient pas sur la console. Je vérifiais la table, je vérifiais le bureau, je vérifiais la console, regardais dans tous les coins au sol, puis pris d’une envie pressante me rendais aux toilettes. A ce moment là j’ai su que je n’aurais pas dû boire tant d’eau. Puis je me remis à la recherche des clés : je vérifiais la table, le bureau, la console, les coins, puis pris de désespoir je me rendais à la cuisine regarder dans le frigo. Elles étaient dans la cuisine à côté de l’évier, et à ce moment là j’ai su que je n’aurais pas dû les poser là en rentrant des courses. Vite, je sortis et tournais la clé dans la serrure. A ce moment là j’ai su que je n’aurais pas dû fermer à clé : le dossier et mon téléphone étaient à l’intérieur. Je rouvrais pour aller les chercher et m’en munit. A ce moment là j’ai su que je n’aurais pas dû laisser la fenêtre ouverte : un courant d’air claqua la porte un grand coup. Je fermais la fenêtre, fermais la porte et courais prendre mon bus. A l’arrêt de bus, je regardais le totem qui indiquait huit minutes d’attente. A ce moment là j’ai su que j’avais du retard. Pendant l’attente, je regardais les voitures passer sur le boulevard. A ce moment là j’ai su que je n’aurais pas dû regarder les voitures : les conducteurs me regardaient comme un mendiant. Je regardais alors l’immeuble d’en face. A ce moment là j’ai su que je n’aurais pas dû : un homme torse nu qui buvait son café m’observa comme un hurluberlu. Alors je me roulais un cigarette et fumais. A ce moment là le monde redevint normal, je regardais les arbres, les oiseaux et les fleurs. Puis je jetais un coup d’œil à mon téléphone et à ce moment là j’ai su que je n’aurais pas dû me préparer pour partir : le rendez-vous était la veille.

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