Voici venu le temps de la négresse. Voici venu le temps de l’écriture, de la falsification, de la trahison, à gros traits, à traits forcés, comme une esquisse, pour les détails on verra ça plus tard.
Voici venu le temps de la danse, du music-hall, du mime, voici venu le temps des plaisirs.
Mais las, comme une fleur se fane…
Voici venu le temps des amours illicites, voici venu le temps de la jeunesse par procuration, voici venu le temps provocant et mûr de l’accomplissement.
Voici venu le temps de se dire, de se raconter, de raconter les autres, de tout dire, et même davantage, voici venu le temps de s’écrire.
Le public n’aurait pas voulu de la vérité nue. Le public n’aurait pas voulu de la vérité crue.
Racontons lui des histoires…
Voici venu le temps du deuil. Voici revenu le temps de l’enfance. Alors quitte à perdre, autant réinventer.
Voici venu le temps d’écrire l’amour qu’on avait au fond de soi, et qu’on a pas eu le temps de vivre, trop occupé à des amours de jeunesse, trop occupé à écrire son histoire.
Voici venu le temps de la guerre. Voici venu le temps de rester à sa fenêtre, et de là, continuer malgré soi à faire un livre, parce qu’on ne sait pas bien faire autre chose, même si on aime pas ça…
Voici le temps d’une vie, passée à se réécrire, à se réinventer chaque jour, parce que si on ne s’invente pas, on meurt trop jeune, et on se promène sur cette terre comme un fantôme de ce que l’on aurait pu être. Alors, chaque jour, la révolution sur soi-même.
Voici une vie libre, elle est déjà passée, mais elle restera comme une trace, comme un sillage, comme une étoile pour les navigations en ces temps de tempête.